À cette époque, on construit les moulins à scie en forêt, près des zones de coupe. Après un certain temps, il arrive qu'on les déménage ou qu'on en aménage un autre ailleurs.

Puisqu'ils sont de petite taille, les moulins à scie se remontent rapidement. Odilon Vachon a travaillé à bâtir plusieurs moulins à scie dans les années 40 et 50, dont le moulin de J.D. Levesque au Ritchie. "Bâtir un moulin, c'était pas long : un carriage, une scie d'edger, ça prenait un mois." (Extrait d'entrevue avec M. Odilon Vachon, journal Le Nord, 1er septembre 1976.)

Des travailleurs du moulin Gosselin à Carey Lake au début des années 40
(Collection de l'Écomusée de Hearst et de la région;
photo gracieuseté de Mme Dolorès Gosselin)
Autour des moulins à scie, on aménage des villages forestiers, comprenant souvent des camps pour les familles, des dortoirs pour célibataires, une cuisine (la cookerie), un magasin, une étable et la plupart du temps, une école et une église.
Magasin général au moulin à scie Levesque à la rivière Kabina,
au milieu des années 50 
On reconnaît Philippe Vachon derrière le comptoir.
(Collection de la Ville de Hearst; photo gracieuseté de Mme Rita Lecours)
Plusieurs des moulins à scie sont activés par des engins à vapeur, qui produisent aussi un peu d'électricité pour les camps et autres bâtiments. Certains, comme le moulin à scie Selin, fonctionnent grâce à des génératrices au diesel qui fournissent aussi du courant pour le village forestier.
Le travail dans la plupart des moulins à scie est saisonnier, se déroulant soit, l'hiver soit l'été. Paul Després a travaillé huit ans au moulin de Noé Fontaine au Lac Ste-Thérèse, dans les années 40. "On travaillait seulement l'été. Ça commençait de bonne heure au printemps, quand la glace partait, puis ça s'arrêtait à l'automne quand elle reprenait. On travaillait six jours par semaine, des semaines de soixante heures. Dans le temps, ça payait pas pire. Ça allait dans les quarante cents de l'heure." (Extrait d'entrevue avec M. Paul Després, Gens de chez nous, Tome 1, p. 82.).
Le "planage" du bois s'effectue surtout l'été. Comme les moulins à scie, la plupart des "planeurs" (usines de rabotage) fonctionnent à vapeur. Certains sont situés près du moulin (ex : Lecours), tandis que d'autres sont éloignés, étant situés à Hearst (Fontaine, Levesque, Selin) où le bois est transporté. 

Comme aux moulins, l'ouvrage dans les planeurs est manuel. Simon Nolet travaille au planeur Fontaine à Mattice lors de sa dernière année d'opération à cet endroit, en 1941, avant son déménagement à Hearst. 

"Dans ce temps-là, tout se faisait à la mitaine. On rentrait le bois dans le planeur à l'épaule. Il fallait se dépêcher, courir jusqu'à l'autre bout pour s'assurer que les morceaux se touchaient, sinon, ça n'aurait pas fait du bon bois." (Extrait d'entrevue avec M. Simon Nolet, Société historique, 1986.)

Au moulin Fontaine au Lac Ste-Thérèse
(Collection de la ville de Hearst; photo gracieuseté de Mme Lucie Verreault)
Le planeur de J.D. Levesque à Hearst fonctionne pratiquement à l'année, puisqu'il "plane" aussi le bois d'autres moulins à scie. 

La coupe des billots se fait dès l'automne et tout l'hiver, autour des camps forestiers (camps avec "cookerie" ou camps de "batch" où les bûcherons doivent se faire eux-mêmes à manger). Les bûcherons coupent le bois à la "sciotte" (bucksaw) et au godendard jusqu'au milieu des années 50 alors que se répand l'utilisation des scies mécaniques. On sort les billots de 12 ou 16 pieds grâce à des "teams" de chevaux. Les hommes travaillent une dizaine d'heures par jour et peuvent passer plusieurs mois en forêt.

Utilisation des chevaux dans les opérations forestières
(Collection de la Ville de Hearst; photo gracieuseté de Mme Dolorès Gosselin)
M. René Picard travaille comme bûcheron chez Fontaine, puis pour Arthur Lecours à Carey Lake au début des années 40. Dans une entrevue, il mentionne que chez Fontaine les bûcherons sont alors payés 3$ du mille pieds. Chez Lecours, M. Picard affirme qu'une trentaine d'hommes demeurent ensemble dans les camps et prennent leur repas à la cookerie. On sert beaucoup de viande et de fèves au lard, mais la nourriture est tout de même variée. Les hommes se couchent à 21 h et ceux qui travaillent avec des chevaux se lèvent à 4 h pour les nourrir. (Extrait d'entrevue avec M. René Picard, Société historique, Témoins notre histoire, p. 136, 137.)
Les travailleurs du moulin Levesque à Kabina prennent le repas à la «cookerie»
(Collection de la Ville de Hearst; photo gracieuseté de Mme Rita Lecours)
À cette époque, le transport des billots au moulin se fait de différentes façons. Dans le cas des moulins Fontaine (à la Passe-à-Fontaine et au Lac Ste-Thérèse), le bois est acheminé sur les lacs l'hiver, grâce à de petits tracteurs. 
Bois transporté par tracteur au moulin Fontaine, à la Passe-à-Fontaine, en 1940
(photo provenant de l'album souvenir de la Paroisse Notre-Dame de l'Assomption, 1969)
Le printemps venu, on utilise des barges pour transporter le bois sur le lac. Le moulin du Lac Ste-Thérèse est aménagé pour permettre un transport du bois avec le courant, sur des barges. Dans le cas du moulin à scie à la rivière Kabina, les billots sont d'abord expédiés sur la rivière, puis par camion.
Un « pole track », ou chemin de billots
(photo provenant de l'album souvenir de la Paroisse Notre-Dame de l'Assomption, 1969)
Puisque le travail est saisonnier, les travailleurs occupent différents postes durant une année et changent souvent d'employeur. Claude Jacques travaille pour de nombreuses compagnies (Selin, Canada Forwarding, Gosselin, Timber Product, Fontaine) à la fin des années 40 et au début des années 50, période pendant laquelle il occupe plusieurs 
emplois : conducteur de camions et de tracteurs, bûcheron et travailleur dans le moulin. "On travaillait trois ou quatre mois, puis tout arrêtait. Au dégel, le printemps, on ne pouvait plus chauffer alors certains prenaient une job dans le moulin. L'automne, y mouillait trop : on allait bûcher au lieu de conduire." (Extrait d'entrevue avec M. Claude Jacques, magazine L'Élan, 1er mars 1988.)

     

 
«Ce projet bénéficie du soutien du gouvernement de l'Ontario, par l'intermédiaire de la Direction du patrimoine et des bibliothèques du ministère de la Culture
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