L’industrie du bois d’oeuvre de la région continuera à croître durant cette période, qui est aussi marquée par la fermeture de quelques scieries et la vente de certaines autres à de plus grandes entreprises.

À la fin des années 60 et au début des années 70, les scies rondes dans les scieries sont remplacées par des scies à ruban, afin de réduire les pertes et d'accroître la production. Toutefois, pour assurer la viabilité de leurs nouvelles scieries, les entrepreneurs de bois de sciage doivent augmenter leur approvisionnement en bois à court et à long terme. La fermeture de l’entreprise Selin permet aux autres de récupérer des droits de coupe sur les cantons privés de Transcontinental Timber (ces cantons seront achetés par Domtar en 1976).

Un développement important a lieu lorsque le député de Cochrane-Nord, René Brunelle, devient ministre du département des Terres et Forêts, en 1971. En effet, il permet aux détenteurs de licences d’obtenir une augmentation de 10 000 cordes de bois par année sur les Terres de la Couronne.

C’est aussi au début des années 70 que les entreprises installent des séchoirs pour le bois. Leur aménagement fait suite, en 1971, à un refus de la part de compagnies américaines de chargements provenant de la région parce qu’ils étaient infestés par des vers (le bois provenait d’arbres qu’un ouragan avait fait tomber, en 1968, au nord du Fushimi). Partenaire dans United Sawmill à l’époque, Roland Cloutier précise :

«La seule manière de tuer les vers, c’est de sécher le bois. De là (cet incident), l’achat du premier dry kiln.»  (Extrait d'entrevue avec M. Roland Cloutier, juillet 2005).

Le séchage du bois est exigé aux États-Unis, puisqu’il permet aussi de réduire la torsion. Comme suite à l’aménagement des séchoirs, les scieries de la région et d’ailleurs se mettent à exporter davantage de bois vers les États-Unis. Par conséquent, pour protéger leurs producteurs, les Américains augmentent leurs tarifs douaniers sur le bois de sciage canadien. C’est le début d’une guerre commerciale de plusieurs décennies.

D'autre part, les conditions de travail évoluent toujours. La syndicalisation entre de façon permanente dans toutes les entreprises et quelques grèves ont lieu durant cette période. Comme les travailleurs de scieries, les travailleurs forestiers sortent des camps pour demeurer dans leurs familles. Le travail forestier est de plus en plus donné à contrat et de nombreux travailleurs deviennent propriétaires d’équipement.

Pendant ce temps, la compagnie Newaygo Timber se lance dans la production de bois de sciage et inaugure à Mead, en 1974, une scierie moderne au coût de 5 M$. L’exploitation a lieu sur les cantons privés de la compagnie, où elle récolte du bois de pulpe depuis les années 20 pour son usine aux États-Unis. Sa fermeture incite la compagnie à construire la nouvelle scierie plutôt que de fermer ses opérations dans la région.

Pour les autres entrepreneurs, l’approvisionnement en bois est une préoccupation importante dans les années 70. Ainsi, dès 1969, Réal Levesque, propriétaire de la compagnie Hearst Transport and Lumber, acquiert Mattice Lumber et sa réserve de bois. Puis, en 1974, Levesque Lumber achète les concessions forestières de l’entreprise Spruce Dale Lumber appartenant à la famille Christianson de Mattice. Leur moulin fermait ses portes après seulement trois ans d’opération. 

La Hearst Lumbermen Association poursuit ses pressions pour que le gouvernement accorde de plus grands territoires de coupe aux entreprises. La survie à long terme de l’industrie et, par le fait même, de la ville de Hearst, en dépend.

Une bataille épique se livre pour l’obtention de droits de coupe dans les cantons le long du chemin de Hornepayne, dont la licence appartient à la compagnie Ontario Paper. L’association fait valoir que ces forêts comprennent beaucoup de cyprès (jackpine), alors qu’Ontario Paper ne l’utilise pas pour le bois de pulpe. Après des années de réclamations, le ministre des Richesses Naturelles, Léo Bernier, accorde finalement quatre cantons et demi aux entrepreneurs de la région, sur un total de sept. Les dirigeants des entreprises affirment que, sans l’obtention de ces droits de coupe, l’industrie et la ville de Hearst n’auraient pas pu survivre.

Au début des années 80, avec l’aide du ministre des Richesses Naturelles, Alan Pope, la Hearst Lumbermen Association réussit à conclure des ententes de tierce partie avec Spruce Falls de Kapuskasing et Kimberly Clark de Longlac pour que les entreprises de bois de sciage puissent faire de la coupe sur leurs territoires, en payant des droits. Les entreprises de pulpe ont moins besoin de bois, étant donné que les scieries les alimentent en copeaux.

En 1980, l’usine BioShell est établie à Hearst. Appartenant à la compagnie Shell International, l’usine est la première au Canada à compresser les résidus des scieries pour fabriquer des briquettes de fibres de bois qui servent comme combustible industriel. Elle offre ainsi aux scieries un débouché pour l’écorce et les déchets de bois destinés aux brûleurs. Les entrepreneurs de bois de sciage avaient auparavant considéré l’aménagement d’une usine productrice d’électricité à partir de ces déchets.

Le début des années 80 est marqué par des consolidations d’entreprises. Les partenaires dans United Sawmill, qui faisaient affaire séparément, s’unifient pour opérer sous le seul nom de United Sawmill Limitée. En 1982, Lecours Lumber achète Gosselin Lumber et sa licence de 32 000 cordes de bois au coût de 3,5 M$. En 1984, aux prises avec différents problèmes, la scierie Newaygo ferme ses portes.

Par la suite, des négociations difficiles débutent entre les entreprises de bois de sciage et le ministère des Richesses Naturelles pour l’établissement d’une entente de gestion de la forêt (Forest Management Agreement ou FMA). De telles ententes existaient ailleurs en province et avaient comme objectif de coordonner la coupe et la régénération de la forêt. Même si la compagnie Levesque Lumber refuse d'y adhérer, l’entente (Hearst Forest Management Agreement) est signée en 1985 par Lecours Lumber et United Sawmill. Pour ratifier l’entente, ces deux compagnies exigent que trois cantons au nord et deux cantons à l’ouest d'Opasatika soient ajoutés à la forêt de Hearst. En vertu de l’entente, les licences de coupe tombent sous la juridiction du Hearst FMA et sont distribuées aux entreprises. Roland Cloutier devient le premier gérant de Hearst Forest Management Inc. Il sera plus tard remplacé par Denis Cheff.

Le début des années 90 signifie la fin de l’appartenance des entreprises de bois de sciage par des familles locales.

En 1989, les actionnaires de United Sawmill prennent la décision de vendre à la compagnie Malette de Timmins. 

Le fait d'être contraint de bûcher dans le canton de Caithness du bois qui avait été ravagé par la tordeuse d’épinettes dans les années 80, combiné à la baisse des marchés du bois et des copeaux, Levesque Lumber éprouve de sérieux problèmes financiers et ferme ses portes en 1992, ce qui entraîne la perte de plus de 400 emplois. La licence de coupe de bois (58 000 cordes sur les Terres de la Couronne) de la compagnie est séparée entre les scieries Malette-United et Lecours Lumber.

En 1994, Tembec achète la compagnie Malette. Peu de temps après, Levesque Plywood est vendu à la compagnie américaine Columbia Forest Products.

En 2006, Lecours Lumber est la seule grande scierie indépendante en Ontario. Elle constitue le dernier vestige des entrepreneurs locaux qui ont établi l’industrie de bois de sciage dans la région.
 


     

 
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